Cette partie du Guide présente une vue d’ensemble de la Convention des Nations Unies contre la corruption (CNUCC) et de ses dispositions sur le secteur privé et se rapportant à l’incrimination, aux sanctions et mesures visant à favoriser la coopération et les signalements de la part du secteur privé. Elle traite en outre du Dixième Principe du Pacte mondial des Nations Unies axé sur la lutte contre la corruption dans le secteur privé, ainsi que des normes découlant de la Convention anticorruption de l’OCDE et de ses Recommandations connexes.
Si les normes internationales susmentionnées sont examinées tout au long du Guide, il existe également dans le monde d’autres normes régionales. La Convention de l’Union africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption8 a en particulier pour objet de promouvoir, faciliter et réglementer la coopération entre les États parties afin de lutter contre la corruption et d’harmoniser les politiques et les législations dans ce domaine.
La Convention interaméricaine contre la corruption9, mise en œuvre par les membres de l’Organisation des États américains, contient des objectifs analogues. Le Conseil de l’Europe a en outre fondé le Groupe d’États contre la corruption (GRECO)10, qui a pour objectif déclaré « d’améliorer la capacité de ses membres à lutter contre la corruption en s’assurant, par le biais d’un processus dynamique d’évaluation et de pression mutuelles par les pairs, qu’ils respectent les normes du Conseil de l’Europe en matière de lutte contre la corruption »11. En outre, le cadre juridique de l’Union européenne en matière de lutte contre la corruption a pour objet de garantir un niveau commun et élevé de législation, d’une part concernant spécifiquement la corruption, d’autre part en intégrant des dispositions anticorruption dans d’autres législations sectorielles.
La Convention anticorruption de l’OCDE et la CNUCC ont aidé les pays qui en sont signataires à promulguer des législations ou à renforcer leur cadre institutionnel et leurs capacités répressives pour combattre diverses pratiques de corruption. Les pays signataires doivent en particulier garantir que les personnes physiques comme les personnes morales peuvent être tenues pour responsables des faits de corruption et faire l’objet de sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives. À elles deux, la Convention anticorruption de l’OCDE et la CNUCC encadrent le comportement des entreprises sur les marchés internationaux au moyen des dispositions qu’elles contiennent concernant les mesures de dissuasion, de détection et les sanctions applicables en cas d’offre de pots-de-vin. Si elles mettent en exergue l’importance de l’incrimination et de la répression, ces deux conventions elles-mêmes ou leurs instruments connexes reconnaissent en outre que le rôle joué par les entreprises en matière de prévention est une composante indispensable de toute politique efficace de lutte contre la corruption.
Conçue pour fournir un cadre exhaustif de lutte contre la corruption, la CNUCC est le seul instrument anticorruption universel juridiquement contraignant. Sa très grande portée et le caractère obligatoire d’un grand nombre de ses dispositions en ont fait un outil unique en son genre pour aider les États à élaborer une réponse globale au problème de la corruption. La CNUCC compte 190 parties12 qui se sont engagées à prendre des mesures à grande échelle visant à prévenir la corruption, à incriminer l’octroi de pots-de-vin et d’autres formes de corruption, à renforcer la répression et la coopération internationale, à instaurer de nouveaux mécanismes juridiques de recouvrement d’avoirs et à prévoir une assistance technique et des mécanismes d’échange de renseignements.
La responsabilité de respecter les obligations qui leur incombent en vertu de la CNUCC appartient en dernier ressort aux États parties. Toutefois, cette convention contient aussi plusieurs dispositions relatives au secteur privé qui revêtent une importance particulière pour les milieux d’affaires. La CNUCC impose aux États parties d’incriminer diverses formes de corruption, comme l’offre de pots-de-vin ou la soustraction de biens dans le secteur privé. Elle contient en outre un article détaillé traitant spécifiquement de la prévention de la corruption dans le secteur privé. Plusieurs autres articles concernent les notions de signalement (protection des lanceurs d’alerte), les sanctions et mesures correctives, ainsi que la coopération entre les autorités et le secteur privé.
Les dispositions relatives à l’incrimination, qui figurent au chapitre III de la CNUCC, constituent une base de référence pour l'intégrité des entreprises, en détaillant les infractions de corruption auxquelles les États sont tenus de conférer le caractère d’infraction pénale en adoptant les mesures législatives nécessaires. En outre, dans le chapitre IV consacré à la coopération internationale, les États parties sont appelés à coopérer entre eux dans les affaires pénales, y compris celles ayant un rapport avec le secteur privé.
La CNUCC contient aussi des dispositions aux termes desquelles les États parties sont tenus d’adopter des mesures visant à promouvoir l’intégrité des entreprises et le signalement de la corruption.
Fort de plus de 22 30015 entreprises participantes et du soutien des 193 États membres de l’Assemblée générale des Nations Unies, le Pacte mondial des Nations Unies reste l’autorité normative mondiale unique et le point de référence pour l’action et le leadership au sein d’un mouvement mondial croissant en faveur du développement durable des entreprises. Il procure un cadre fondé sur des principes qui aide les entreprises à comprendre comment fonctionner de manière responsable et à tenir leurs engagements vis- à-vis de la collectivité.
Cela signifie agir d’une manière qui, au minimum, réponde à ses responsabilités fondamentales dans les domaines des droits de l’homme, du travail, de l’environnement et de la lutte contre la corruption. Le dixième et dernier principe du Pacte mondial des Nations Unies concerne la lutte contre la corruption. Adopté en 2004, il engage les participants à éviter la corruption, l’extorsion et d’autres formes de corruption, mais aussi à développer de manière proactive des politiques et des programmes concrets pour lutter contre la corruption en interne et au sein de leurs chaînes d’approvisionnement. Les entreprises sont également mises au défi de travailler collectivement et de rejoindre la société civile, les agences des Nations Unies et les gouvernements afin d’atteindre une économie mondiale plus transparente.
Les réseaux locaux sont devenus une composante essentielle du Pacte mondial des Nations Unies. Il s’agit de plateformes multipartites au travers desquelles les participants se réunissent pour coopérer directement avec les entreprises en vue de les aider à promouvoir les dix principes du Pacte mondial des Nations Unies. Ils aident les entreprises à comprendre ce que signifie une entreprise responsable dans différents contextes nationaux, culturels et linguistiques et facilitent la sensibilisation, l’apprentissage, le dialogue politique, l’action collective et les partenariats16.
La Convention sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales (la Convention anticorruption de l’OCDE) est le premier et seul instrument international anticorruption ciblant la corruption active. Elle a été signée en 1997 et est entrée en vigueur en 1999. Au 1er janvier 2024, 46 États y étaient Parties17. Toutes les Parties à la Convention sont membres du Groupe de travail sur la corruption dans le cadre de transactions commerciales internationales (le Groupe de travail de l’OCDE sur la corruption).
La Convention anticorruption de l’OCDE contient des normes juridiquement contraignantes visant à incriminer la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales.
Du mécanisme d’évaluation par les pairs prévu par la Convention anticorruption de l’OCDE et mis en œuvre par le Groupe de travail de l’OCDE sur la corruption ont découlé des réussites notables pour l’action publique.
Depuis l’entrée en vigueur de la Convention anticorruption de l’OCDE le 15 février 1999 :
Afin de promouvoir la mise en œuvre des obligations de fond qu’elle prévoit, la Convention anticorruption de l’OCDE institue un mécanisme d’évaluation par les pairs mené à bien par le Groupe de travail de l’OCDE sur la corruption. Ce mécanisme se compose de phases successives. Les rapports d’évaluation par pays adoptés par le Groupe de travail contiennent des recommandations formulées en se fondant sur l’examen rigoureux de chaque pays.
La Convention anticorruption de l’OCDE est complétée par un ensemble d’instruments connexes contenant des mesures que ses Parties sont tenues de mettre en œuvre en vue de renforcer les efforts qu’ils déploient pour prévenir et détecter la corruption transnationale et mener des enquêtes dans ces affaires. La Recommandation du Conseil visant à renforcer la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales adoptée en 2021 (la Recommandation anticorruption de l’OCDE de 2021)18 rend compte des recommandations formulées par le Groupe de travail par le biais de ses évaluations par pays et garantit qu’il continue à répondre aux nouvelles menaces que représente la corruption transnationale et aux défis liés à son éradication.
La Recommandation anticorruption de l’OCDE de 2021 introduit des dispositions sur des questions telles que les exigences relatives à l’intégrité des entreprises :
Le Guide de bonnes pratiques pour les contrôles internes, la déontologie et la conformité (Annexe II à la Recommandation anticorruption de l’OCDE de 2021) prévoit que les programmes de conformité des entreprises devraient être adaptés aux risques et être accessibles à tous les salariés. Il précise en outre que les dispositions de conformité anticorruption sont applicables aux entreprises publiques comme aux entreprises privées.
En outre, la Recommandation anticorruption de l’OCDE de 2021 reconnaît dans son préambule le rôle que sont susceptibles de jouer les technologies innovantes pour soutenir les efforts des secteurs public et privé dans la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers.