Une approche multipartite de lutte contre la corruption peut renforcer l’intégrité des entreprises. Cette approche réunit des entités publiques, des entreprises, des organisations de la société civile et d’autres acteurs concernés qui peuvent ainsi prendre part à une action collective, à des stratégies nationale de lutte contre la corruption, à des mécanismes d’aide du secteur public destinés à renforcer les capacités du secteur privé, et bien plus encore. Les États ont en outre la possibilité concevoir avec le secteur privé des mécanismes et des moyens d’action pour renforcer les efforts anticorruption.
L’expression « action collective » désigne des efforts collaboratifs de multiples parties prenantes, y compris des entités gouvernementales, des entreprises, des organisations de la société civile et d’autres acteurs pertinents, visant à traiter les problèmes de corruption et à promouvoir l’intégrité. Le concept d’action collective repose sur le postulat suivant : combattre la corruption exige l’engagement commun et l’action coordonnée de différentes parties.
Les approches fondées sur l’action collective peuvent prendre des formes diverses, telles que des initiatives sectorielles, des alliances industrielles, des coalitions anticorruption, des partenariats public- privé et des plateformes collaboratives. Fondamentalement, l’action collective anticorruption réunit des entreprises et d’autres parties prenantes afin de faire face à des problèmes communs en matière de corruption, d’améliorer les normes d’intégrité commerciale et de favoriser une concurrence équitable39.
L’action collective, qui était à l’origine une approche nouvelle, est désormais reconnue et encouragée par divers instruments juridiques, y compris comme un outil potentiel de renforcement de l’intégrité des entreprises, notamment dans la déclaration politique de l’UNGASS de 2021 et dans la Recommandation anticorruption de l’OCDE de 202140. Le Pacte mondial des Nations Unies a également rédigé un Manuel sur l’action collective de lutte contre la corruption41, exposant une approche en six étapes (Préparer, Présenter, Développer, Mettre en œuvre, Évaluer et Faire Évoluer et Maintenir, comprenant une série de sous-étapes à prendre en compte) pour aider à la conception et à la mise en œuvre des initiatives d’action collective42.
On trouvera ci-dessous quelques exemples pratiques d’initiatives d’action collective.
Plusieurs exemples venus du monde entier illustrent les initiatives d’action collective prises dans le secteur privé pour lutter contre la corruption.
Les autorités publiques peuvent collaborer avec le secteur privé et d’autres parties prenantes lors de la conception des politiques et des législations nationales de lutte contre la corruption. Différentes parties prenantes peuvent fournir des informations et des recommandations très utiles qui permettront de concevoir une stratégie plus efficace et mieux adaptée aux besoins et à la situation spécifique du pays. La participation de multiples acteurs très divers peut contribuer à forger une vision commune et à accroître la légitimité des législations et des politiques dans la société tout entière. Ceux qui auront la conviction d’avoir été entendus pendant l’étape de conception d’une politique seront plus à même de se poser en défenseurs de la stratégie lorsqu’il s’agira de la promouvoir et de la mettre en œuvre43.
Le secteur privé peut apporter une contribution substantielle au cycle de vie d’une stratégie nationale de lutte contre la corruption, au-delà du simple respect de ses dispositions. L’évaluation du risque de corruption permet aux gouvernements d’obtenir de précieuses informations sur les défis auxquels la communauté des milieux d’affaires de leur pays se trouve confrontée. Pendant la formulation des priorités et des objectifs de la lutte contre la corruption, les entreprises peuvent recommander les politiques et les cadres législatifs qui sont nécessaires afin de lutter contre les systèmes de corruption affectant leurs entreprises, et suggérer des initiatives pratiques pour améliorer l’intégrité des entreprises. Les entreprises peuvent guider les gouvernements afin de garantir que les outils politiques soient applicables et pratiques plutôt que théoriques et inapplicables.
L’action collective peut générer un sens de l’appropriation et de l’engagement de la part du secteur public comme du secteur privé, indispensable pour une application efficace de la stratégie. Au cours de cette phase, la coopération prend les formes suivantes : sessions communes de formation à la lutte contre la corruption, promotion de valeurs partagées et dialogue permanent pour l’élaboration de réglementations. Enfin, le secteur privé peut jouer un rôle clé pour contrôler et évaluer l’impact de la stratégie en demandant des comptes au gouvernement et en assurant un retour d’informations dans les domaines ayant des incidences directes sur ses opérations.
Les entreprises peuvent jouer un rôle actif dans la conception et la formulation des cadres réglementaires de promotion de l’intégrité et de lutte contre la corruption. Tel est particulièrement le cas si les capacités des autorités réglementaires sont limitées. Les entreprises peuvent s’engager auprès des institutions publiques pour élaborer une forme hybride de réglementation basée sur le droit public (droit dur) et des accords privés (droit souple). De cette manière, l’action collective permet de concevoir conjointement des sanctions et des incitations44. La conception conjointe de cadres réglementaires peut également inciter le secteur privé à se joindre à ces types d’initiatives.
Les États doivent adopter et faire appliquer les lois et réglementations anticorruption mais aussi les faire connaître et les diffuser. Les États devraient fournir aux entreprises des orientations sur les exigences légales de conformité, sur la manière de concevoir des programmes et politiques efficaces de lutte contre la corruption répondant à la loi, et sur les meilleures pratiques de lutte contre la corruption. Le secteur privé devrait être associé précocement au processus de définition des meilleures pratiques, afin d’aider les gouvernements à comprendre les réalités du terrain, la capacité de mise en œuvre du secteur privé et ses limites, et à définir un plan pour améliorer continuellement les meilleures pratiques à l’avenir. Il est fondamental que les attentes en la matière soient communiquées par l’État au secteur privé et vice versa
L’approche multipartite de la lutte contre la corruption développe la capacité d’apprentissage mutuel. Les États peuvent grandement bénéficier d’une coopération des acteurs non étatiques, tels que les organisations de la société civiles, les médias et les associations patronales.
Les gouvernements peuvent apprendre des acteurs du secteur privé par divers moyens, y compris la formation aux questions de la lutte contre la corruption, la fourniture de conseils sur les facteurs de risque et même la rédaction de textes législatifs, afin de s’assurer que les cadres légaux répondent aux exigences des acteurs du terrain.
Le renforcement des capacités est un autre domaine où les secteurs public et privé peuvent apprendre
l’un de l’autre, comme l’illustrent les études de cas ci-dessous.